À toutes celles qui sont en processus

Par Rachel Plouffe Éthier

Avoir un bébé, ce n’est pas aussi facile que tu penses. Selon les statistiques, on aurait 25% de chance de faire un bébé à chaque cycle menstruel, et une femme tomberait enceinte entre 3 et 6 mois d’essai, en moyenne. On dit qu’après un an, si tu n’es toujours pas enceinte, faut consulter.

Ben nous on a décidé de “bypasser” le système, parce que ça ne me tentait pas d’attendre un an. Parce que ça faisait déjà 9 mois qu’on essayait. Parce que j’ai vu mes amies, mes collègues, des filles de mon entourage tomber enceinte une après l’autre, et laisse-moi te dire que le coup de couteau que tu reçois chaque fois que tu apprends une grossesse, il fait aussi mal la dernière que la première fois.

Ça fait qu’après 9 mois d’essai, on a consulté en changeant quelques dates pour que le médecin pense que ça faisait un an qu’on essayait. Pis je vais t’avouer que j’avais quasiment le goût d’apprendre qu’un de nous deux avait quelque chose qui clochait. Pour faire avancer les choses. Pour qu’on nous prenne au sérieux. Pour qu’on puisse consulter dans une clinique de fertilité. Le médecin nous a prescrit des prises de sang et un spermogramme pour mon chum. De mon côté, rien d’anormal. Du sien… Ben ça regardait mal. Mon chum a dû faire 2 autres spermogrammes à 3 mois d’intervalle pour finalement se faire conseiller d’aller consulter dans une clinique spécialisée.

Pour moi, ça a été une sorte de délivrance. Là, ça faisait plus qu’un an qu’on essayait. Je peux te dire que j’en ai vu, des tests de grossesse négatifs. Pis à chaque fois, chaque maudite fois, j’espérais pareil. Malgré le diagnostic.

En janvier 2017, on a eu notre premier rendez-vous à la clinique de fertilité. Il fallait que mon chum passe un autre spermogramme, et moi je devais avoir une hystérosalpingographie (bref, vérifier qu’il n’y a rien de bloqué dans mon système reproducteur). De mon côté, toujours rien d’anormal. On a confirmé qu’il y avait bien un problème du côté de mon chum. Encore une fois, ça a été un soulagement pour moi : j’avais eu raison de faire avancer les choses. Je savais que quelque chose clochait.

Ça fait qu’après avoir eu les résultats, on a commencé à faire des inséminations. Oui oui, comme les vaches. On t’injecte le sperme de ton chum dans un petit cathéter directement dans l’utérus, mais avant, faut passer par 1000 étapes (j’exagère à peine). Faut prévoir ta date d’ovulation pis comme les tests ne sont pas toujours fiables, faut passer des échographies tous les 2 jours, mais avant ça, il faut que tu prennes des médicaments qui vont améliorer ton ovulation. Pis quand c’est le bon moment, tu t’injectes une hormone pour provoquer l’ovulation.

On a fait 3 inséminations. 

3 mois d’espoir. 

3 mois d’échec. Encore. 

Si tu calcules, j’ai eu besoin d’aller à la clinique à 8h le matin en plein trafic tous les deux jours pendant 1 semaine à trois reprises. Pour rien.

En juin, on s’est dit ça y est, on essaie l’in vitro. Ça, c’est plus compliqué. C’est autant de rendez-vous, mais avec 4x plus de médicaments. Sous forme d’injection. Que tu fais toi-même. Tous les soirs pendant une semaine et demie. Pis laisse-moi te dire que ce n’est pas gratuit tout ça! La FIV en tant que telle, ça tourne autour de 7200$. Ajoute à ça un bon 1000$ de médicaments si tu n’as pas d’assurance (heureusement, on en avait). 

Après vient le grand jour, le moment où l’on va prélever tes ovules. On te donne une belle jaquette, on te branche à un soluté, on te fait prendre un antidouleur sous forme de suppositoire pis on t’injecte du Fentanyl pour te geler le cerveau un peu. Pis on te pique dans le vagin (oui oui) pour te geler ben comme il faut pour ne pas sentir l’aiguille qui va aller chercher les ovules dans tes ovaires. Ça dure 20 minutes, pis après on te laisse dégeler un peu pour te renvoyer chez vous, attendre qu’on te donne des nouvelles de tes bébés. 

Le lendemain, l’embryologiste t’appelle pour te dire combien d’ovules étaient matures et combien ont été fécondés. Il te rappelle aux 2 jours jusqu’à max 5 jours après la ponction des ovules. Et là, tu retournes à la clinique (ça en fait du kilométrage, hein! ) pour te faire “injecter”, enfin, ton bébé. On te donne une prescription de prise de sang à faire 2 semaines plus tard. Les deux semaines les plus longues de ta vie. 

Ben, ça n’a pas marché.

J’ai passé un été de marde. Une chance qu’on venait d’acheter une belle maison pis qu’on pouvait se pitcher dans ce projet-là, parce qu’on serait devenus fous tous les deux. 

Pis sais-tu quoi? Ben à l’automne, on a recommencé. 3 inséminations. 3 nouveaux échecs. Ça faisait 2 ans qu’on essayait. On a fait une dépression juste avant Noël. 

Pis en janvier, “fuck that”, on a décidé qu’on refaisait une FIV.

J’avais de l’espoir malgré tout. Tu peux te dire que je dois être folle, qu’après autant d’échecs, vaut mieux s’arrêter là et prendre une pause. Mais je le voulais cet enfant-là! Je le voulais plus que n’importe qui! Plus que n’importe quoi! 

Ben imagine-toi donc que, 2 semaines plus tard, après avoir repassé par toutes les étapes, après avoir augmenté les doses de médicaments, après m’être injecté pendant presque 2 semaines des hormones pour faire grossir mes ovules, après être allée une dizaine de fois à la clinique, je l’ai vue. Je n’en croyais pas mes yeux. La maudite ligne sur le test de grossesse, celle que j’avais tant voulu voir… Ben elle était là! Enfin! Après 2 ans et demi! Je n’ai jamais pleuré de même, mon chum non plus. On n’y croyait pas! Moi, enceinte! L’après-midi même, j’ai reçu un coup de fil de la clinique : la prise de sang confirmait ma grossesse! C’était vrai! 

Aujourd’hui, je suis maman d’un petit garçon. Pis tout va bien. Je suis la femme la plus heureuse au monde, tu ne peux même pas comprendre!

À toutes celles qui sont en processus… Lâchez pas. Ça va arriver. Oui ça peut être long. Oui ça peut coûter cher. Oui tu vas en vivre des down. Mais je te jure que le bonheur que tu ressens en voyant la ligne rose, ça efface tout. Je n’ai rien oublié, mais mon bébé a passé la moppe sur les larmes de douleur qui inondaient mon plancher.

Je t’aime mon ourson. 

 

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